mercredi 4 juin 2014

Le Chuchoteur - Donato CARRISI



Après une absence de plusieurs mois, j’entrouvre ici une parenthèse littéraire, témoin d’une rencontre hors du commun avec un virtuose du thriller italien, Donato CARRISI, dont le patronyme n’échappera certainement pas aux amateurs du genre et qui m’a complètement envoûtée.

Né en 1973, Donato CARRISI, a toujours été baigné dans l’univers des sciences criminelles et comportementales.
Auteur d’une thèse sur Luigi Chiatti, le « Monstre de Foligno », un tueur en série italien, et journaliste de formation, s’est tout naturellement qu’il se tourna vers l’exercice complexe de l’écriture noire.
Mon baptême carrisien fut consacré avec l’un de ses petits joyaux, Le Chuchoteur, Prix des lecteurs policiers 2011 et Prix SCNF du polar européenn, véritable best-seller paru en 2009 chez LGF et 2010 chez Calmann Levy.
Une entrée en matière captivante et bouleversante à laquelle l’auteur, d’après de récentes informations, a décidé, plusieurs années après, de donner suite avec L’Ecorchée ( voire plus si affinités ).


Dieu Se Tait, Le Diable Murmure ...

Avec Le Chuchoteur, les promesses intrigantes de suspense et d’angoisse sont tenues dès la première de couverture avec une illustration aussi douce et innocente que dérangeante, le portrait figé d’une poupée de porcelaine au regard impénétrable, témoin ou complice du secret pesant que renferme l’œuvre .
« Cinq petites filles ont disparu. Cinq petites fosses ont été creusées dans la clairière. Au fond de chacune, un petit bras, le gauche. Depuis le début de l’enquête, le criminologue Goran Gavila et son équipe ont l’impression d’être manipulés.
Chaque découverte macabre les oriente vers un assassin différent.
Lorsqu’ils découvrent un sixième bras, appartenant à une victime inconnue, ils appellent en renfort Mila Vasquez, experte en affaire d’enlèvement.
Dans le huis clos d’un appartement, Gavila et ses agents vont échafauder une théorie à laquelle nul ne veut croire ».

 Un Jeu de Piste Diabolique


L’auteur nous met d’entrée de jeu dans le bain, avec la découverte de la scène de crime en premier plan. 
Une démarche qui a mon sens a l’intelligence de ne pas nous ennuyer ou nous empêtrer dès le début dans des détails suffocants concernant la psychologie des personnages.
Aucun répit n’est laissé au lecteur, donc, qui se trouve soudainement submergé par l’horreur de la fresque, une véritable « hydrocution ».
Et c’est parti pour 570 pages de véritable chasse au trésor macabre aux arrières goûts de règlement de comptes, un labyrinthe pervers et fascinant dans lequel on finit par perdre le fil de ses investigations et parfois même laisser une brèche ouverte dans notre subconscient permettant ainsi à l’auteur et son « chuchoteur » de pénétrer notre esprit et notre échelle de valeurs.
On a très vite le sentiment que chaque épisode a été réduit à sa portion congrue, que l’auteur n’a sans doute pas hésité à faire le sacrifice de passages délayés qui auraient pu porter préjudice à son œuvre, mais accroître considérablement son chiffre d’affaires.
Le travail est digne de celui d’un orfèvre, impressionnant. 
Les rebondissements ne se font pas attendre et nous assaillent de toute part : on finit par craindre à la mi-lecture que CARRISI n’est plus rien à donner à la fin du livre tellement la construction de l’intrigue est nourrie.
La signature d’un grand esprit qui a à cœur d’offrir le meilleur de lui.
Les clés du mystère sont éparpillées un peu partout, reste au lecteur de savoir y prêter une grande attention et de déjouer les pièges. 
On se laisse littéralement capté par le « ventre du monstre ».
La force de cette fresque réside également dans un travail de fouille documentaire minutieux basé la plupart du temps sur des affaires réelles (études FBI en partie) et les récentes découvertes faites en criminologie qui ne font que renforcer la crédibilité du roman et sublimer l’imagination dont l’auteur fait montre.
Comme prend le temps de nous l’expliquer Donato CARRISI, le Chuchoteur est un profil de tueur en série sui generis, c’est-à-dire, n’empruntant à aucune autre catégorie déjà répertoriée.
Son génie réside dans sa capacité à investir l’esprit d’un tiers et d’y déposer des besoins, des désirs souvent obscènes et en contradiction parfaite avec les valeurs et la morale du sujet.
Ainsi, difficile de démontrer son implication directe dans les massacres programmés.
La morale du livre nous pousse à nous méfier de nous mêmes plus que des personnages qui composent l'intrigue, de nos limites et de nos certitudes quant au passage à l'acte.

Bonne Embarcation Moussaillon !

Note : 5/5

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